Fils de l'excellente actrice Renée Saint-Cyr, qu'il contribua à sortir de sa difficile période d'après-guerre, Georges Lautner débuta sa carrière avec des films que l'on peut aujourd'hui découvrir en DVD, La môme aux boutons (1958), Marche ou crève (1959) ou Arrêtez les tambours (1960). Dès lors, tous ses films sont presque susceptibles d'êtres revus, à commencer par la série d'espionnage mettant en scène Paul Meurisse en espion flegmatique, le Monocle noir (1961), L’œil du monocle (1962) ou Le monocle rit jaune (1964). Le septième juré (1961), au sujet très fort, avec Bernard Blier, était un de ses films préférés. Quelques films moins notables, tels que Les pissenlits par la racine (1963) ou Les bons vivants (1965), nous permettent quand même de revoir Louis de Funès, Andréa Parisy, Dany Saval ou Mireille Darc dans leur jeunesse. La vie dissolue de Gérard Floque (1986) est un témoignage de la fin d'une époque.
Je ne sais plus par où j'ai découvert Georges Lautner, mais quand je pense à lui, c'est immédiatement les films de Jean-Paul Belmondo qui me viennent à l'esprit, curieusement. La musique de Flic ou voyou (1979) m'obsède depuis quelques minutes ; depuis que j'ai appris le décès de Lautner. Pourtant, si le film se regarde encore avec délice grâce aux dialogues de Michel Audiard et à la présence charismatique de Belmondo, la mise en scène est passée. Un des traits caractéristiques de Georges Lautner, réalisateur, est à mon sens sa capacité d'adaptation à son époque, avec plus ou moins de bonheur. Un académisme de bon ton mêlé à la mode du moment : ainsi des ralentis ou des trois vues différentes d'un même plan de Flic ou voyou, terriblement datés - ou des gros plans du Professionnel (1981), toujours efficaces trente ans plus tard. Je ne me lasse pas de revoir Le Guignolo (1980) malgré les évidentes lacunes du film, tout comme Joyeuses Pâques (1984), adaptation rythmée de la pièce de Jean Poiret. Je n'ai toujours pas vu L'inconnu dans la maison (1992), son dernier film, terrible échec en son temps.
Georges Lautner était aussi l'un des metteurs en images les plus proches de Michel Audiard et c'est sans doute avec une bonne intention que les médias, en hommage, nous repasserons en boucle la scène de la cuisine des Les tontons flingueurs (1963), probablement son film le plus célèbre, à juste titre un chef d'oeuvre de la comédie française, presque tout autant que Les barbouzes (1964). Ne nous fâchons pas (1966), La grande sauterelle (1967) et Laisse aller c'est une valse (1970) complètent cette période bénie, qui s'achève avec l'arrivée des grandes stars, à l'américaine. Alain Delon d'abord, avec ses exigences absurdes (Georges Lautner se souvient d'avoir été obligé de démonter un travelling complexe pour que le chauffeur de Delon puisse garer la voiture de la star) ; Belmondo ensuite. En passant par Gabin (Le pacha, 1968), Pierre Richard (On aura tout vu, 1976), Michel Serrault (La cage aux folles 3, 1985) et même Robert Mitchum (Présumé dangereux, 1989), on pourrait dire que Georges Lautner doit sa carrière aux noms du haut de l'affiche. Cela serait, à mon sens, un peu rapide et j'aurais tendance à penser comme beaucoup que le réalisateur peut faire les vedettes tout aussi bien que l'inverse.
Georges Lautner fut un grand artisan du cinéma français - en témoignent des scènes légendaires des Tontons flingueurs, des Barbouzes, des Belmondo, des Delon et des autres ... un de mes films favoris n'est-il pas Quelques messieurs trop tranquilles (1972) ? Celui qui fut l'un des réalisateurs les plus prolifiques et les plus rentables du cinéma français avait laissé un livre de mémoires, sous forme d'abécédaire (On aura tout vu, Flammarion) dont j'avais déjà parlé sur ce blog. Avec lui s'éteignent quelques fragments de notre jeunesse, quelques souvenirs cinéphiles et beaucoup de plaisirs en forme d'éclats de rires. De là à citer les Tontons, il n'y aurait qu'une facilité ... mais si juste pour résumer cet hommage. Toute une époque ...
Georges Lautner et Mireille Darc (bonus du DVD des Barbouzes) |
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