samedi 6 octobre 2012

"ALLO BERLIN ? ICI PARIS !" (de Julien Duvivier, 1932)


En quelques mots : Lily travaille dans un standard téléphonique à Paris ; Erich dans un standard de Berlin. A force de se parler au quotidien, ils sympathisent, se séduisent et décident de se rencontrer. Mais leurs collègues respectifs décident eux-aussi de saisir leur chance, malgré la barrière de la langue.

Il y a quelque chose de magnifique à voir des Allemands chanter au son de "vive la liberté" quelques mois avant l'arrivée de Hitler au pouvoir suprême. 1932 sous l’œil de Julien Duvivier semble encore être une époque de plaisir et de fête. Des tavernes de Berlin au plus vieux cabaret de Montmartre, le film est un hymne à l'amitié franco-allemande qu'il est très plaisant de découvrir aujourd'hui, à l'heure où les dirigeants des deux pays ont fêtés les ... 50 ans de la réconciliation. De quoi conforter les nostalgiques adeptes du classique "c'était mieux avant !", et les cinéphiles qui peuvent constater à quel point le réalisateur français n'est pas surestimé.
Car l'adhésion qu'emporte Allo Berlin ? Ici Paris ! est due en grande partie à la mise en scène inventive de Julien Duvivier, qui se plait à faire bouger sa caméra pour créer des séquences originales, telle la visite de Paris dans un bus trop rapide ou l'arrivée pluvieuse du président d'un organisme à Berlin.



Le film est à plusieurs niveaux une transition. D'abord dans le contexte historique - l'Allemagne entre dans les années nationales-socialistes l'année suivante ; dans la carrière de Duvivier qui s'apprête à tourner ses films les plus connus ; en ce qui concerne la sonorisation du film : Allo Berlin ? Ici Paris ! n'est pas un film muet mais il en contient les derniers stigmates (longues séquences sans dialogues, bruits de téléphones absents, omniprésence ou absence d'une musique qui accompagne l'intensité dramatique) ; dans le genre qu'il amorce enfin, le film étant à l'évidence une sorte d'ancêtre de la screwball comedy américaine (les comédies de Capra, Hawks, Cukor) avec ses situations comiques involontaires au cœur d'une intrigue amoureuse.

Une scène est particulièrement belle et audacieuse, celle où l'on voit Josette Day se changer, en ombres chinoises derrière un rideau - ce même rideau qui apparaît et tombe dans New York-Miami de Frank Capra.

Évidemment le film souffre des années, notamment quand il faut assimiler les personnages (aucune star, si ce n'est la belle Josette Day) et les situations, ou dans certaines séquences muettes où l'on aimerait qu'il se passe quelque chose. Toutefois, il me semble essentiel de ne pas passer a côté de ce formidable film de Julien Duvivier, que Gaumont à eu la bonne idée d'éditer en DVD (collection à la demande). L'image est terriblement sale, le son pas toujours heureux, mais la copie reste largement visible.

Aucun commentaire:

Related Posts Plugin for WordPress, Blogger...