samedi 30 novembre 2013

"SALONIQUE, NID D'ESPIONS" (de Georg Wilhelm Pabst, 1937)

En quelques mots : A la fin de la Première Guerre Mondiale, sur le front d'Orient. Mademoiselle Docteur, insaisissable espionne au service de l'Allemagne, est envoyée à Salonique, en Grèce, pour aider l'empire germanique à lancer une contre attaque sur les forces des Alliés. Mais un traître menace de la démasquer.

Salonique, nid d'espions est une très belle surprise. Réalisée en 1937 par Georg Wilhelm Pabst, réalisateur allemand exilé en France depuis l'arrivée au pouvoir des nazis dans son pays, cette aventure d'espionnage mériterait d'être redécouverte. Servie par un imposant casting franco-allemand, elle a l'originalité de proposer une histoire traitant des services d'espionnage pendant la Première Guerre Mondiale, qui plus est sur le front d'Orient entre la Grèce et la Bulgarie - une partie de l'Europe en guerre souvent méconnue du grand public, à l'image du Capitaine Conan de Vercel (adapté au cinéma par Bertrand Tavernier en 1996). En outre, l'espion de grand talent et recherché activement par les Alliés est une femme, autour de qui tout s'organise. Cette seconde originalité ne doit, toutefois, pas faire illusion, Salonique est un film d'hommes, où LA femme est un homme comme les autres. L'argument posé, le film offre tous les éléments classiques d'un grand film d'aventures, fait de jolies femmes mystérieuses, d'agents doubles, de traîtres, d'hommes d'honneurs, d'exotisme et d'un petit brin de fantaisie.



Le seul problème du film vient, hélas, de la copie abîmée, très médiocre et aujourd'hui introuvable dans une meilleure version DVD - d'où parfois un souffle ou des plans coupés qui rendent inintelligibles quelques scènes, ce qui dérange dans un film d'espionnage où chaque élément a son importance. Qu'importe puisque le résultat est plus qu'agréable à visionner. On y retrouve pêle-mêle Pierre Blanchar en agent à double tranchant, argument comique du film avec son improbable fez vissé sur la tête ; Louis Jouvet en sombre espion allemand, très sobre même lors d'une jolie séquence comique avec Jean-Louis Barrault, manifestement fou ; Charles Dullin dans un trop court rôle d'officier ; Pierre Fresnay dans un ersatz sans épaisseur du capitaine de Boëldieu de La Grande Illusion (Renoir), tournée la même année ! ; Viviane Romance sous employée à jouer les charmantes danseuses de cabaret, même si son rôle est important ; Dita Parlo enfin, en espionne sensuelle et courageuse.


Salonique souffre de quelques longueurs, dues à une baisse de rythme que l'on retrouve dans beaucoup de films de cette époque, qui n'utilisent pas assez la musique. Pourtant, force est de reconnaître l'évident plaisir qui se dégage de ces scènes entre Pierre Blanchar, Pierre Fresnay et Dita Parlo ; Louis Jouvet et Jean-Louis Barrault. Le réalisateur sert un grand spectacle sur un fond historique oublié, avec suspens et action (une jolie course poursuite en voitures à la fin). Une sortie restaurée en DVD serait vraiment une grande idée et permettrait au plus grand nombre de redécouvrir ce charmant film d'espionnage.

vendredi 29 novembre 2013

Les idoles sont sur Facebook !

L'âge d'or du Cinéma Français est présent sur Facebook depuis maintenant quelques mois et rencontre un succès que je n'aurais pas imaginé. Vous êtes aujourd'hui près de 350 à suivre régulièrement les mises à jour du blog, les actualités, les partages des internautes. Je ne peux que vous remercier à nouveau de votre fidélité et encourage les visiteurs qui le souhaitent à aimer la page Facebook du blog, avec ce lien ou grâce au menu de gauche. Certains internautes inscrits sur la page ont également pu voir que j'ai créé dernièrement un certain nombre de pages fan, consacrées entièrement à un acteur ou une actrice. Dans cette immense usine à gaz, certains tirent leur épingle du jeu et il n'est pas rare de voir de jeunes starlettes à la maigre filmographie dépasser le million de fans. Ainsi Facebook peut-il devenir, à mon sens, un tremplin pour réhabiliter un artiste oublié, continuer à parler de sa carrière, de ses films. Dès lors, vous pouvez consulter et liker les pages fan des artistes suivants :

          | Page Facebook de Suzy Delair
               | Page Facebook de Pierre Blanchar
                    | Page Facebook de Micheline Francey
                         | Page Facebook de Jacques Dufilho

jeudi 28 novembre 2013

"LA BÊTE HUMAINE" (de Jean Renoir, 1938)



En quelques mots : Lantier est le conducteur d'un train qui relie régulièrement Paris au Havre. Victime de pulsions meurtrières, il a cessé de boire de l'alcool et ne semble apaisé que sur sa locomotive. Retenu en Normandie après une avarie, il tombe amoureux de la femme du sous-chef de la gare, lequel vient de tuer l'amant de celle-ci.

C'est toujours une grande joie de revoir, sur grand écran et en version restaurée, un film de Jean Gabin. Il y a quelques mois c'était La Grande Illusion (Renoir, 1937), aujourd'hui La Bête humaine est à l'honneur un peu partout en France pour accompagner la sortie du Blu-ray (StudioCanal). La scène d'ouverture n'a rien perdu de son souffle - la première image est une chaudière qui hurle, Gabin et Carette ne peuvent pas s'entendre et communiquent par signaux. A toute vapeur, la caméra nous plonge pendant une dizaine de minutes sur les derniers kilomètres du Paris-Le Havre dans les années 1930, à tel point que le spectateur peut croire sans mal qu'il est à l'intérieur de la locomotive. Le roman original de Zola est adapté par Jean Renoir, un peu rapidement parfois, et souffre aujourd'hui d'un classicisme encombrant : des scènes d'amour pudiques avec des fins où les deux personnages regardent vers l'horizon, joue contre joue ; des interprétations théâtrales de la part de Simone Simon ; une trame romanesque un peu longuette (propre aussi au roman). De quoi remettre en question le qualificatif de Chef d'oeuvre, rapidement évoqué dans la presse pour cette ressortie au cinéma. L'âge d'or du Cinéma Français n'ira pas jusqu'à là.



Toutefois, force est de reconnaître que La Bête humaine peut se targuer de nombreuses qualités, notamment sur la manière de filmer une classe sociale. Dès les premiers plans du film, on se croit et on se rêve cheminot, dans la suie, l'huile et l'enfer d'une locomotive à vapeur. Les films contemporains ne s'aventurent que très rarement à filmer des petites gens, des ouvriers, préférant la nouvelle petite bourgeoisie urbaine et fortunée. Chez Renoir, les hommes sont libres, face à leurs destins, dignes. De fait, l'excellent casting y participe : Julien Carette en compagnon de route, Fernand Ledoux en assassin brisé, Blanchette Brunoy pour quelques minutes de grâce à la campagne, Jean Renoir en ouvrier gueulard ou encore Marcel Pérès, éternel troisième couteau.

Jean Gabin trouve là l'un de ses meilleurs rôles, d'une intensité remarquable malgré des dialogues souvent mièvres. Sa folie est contenue - il n'a d'ailleurs rien d'une bête humaine - mais explose lorsqu'il approche du bonheur. Par son ascendance familiale (il est le fils de Gervaise et se fend d'une longue tradition d'alcoolisme), il est devenu un inadapté à tout ce que la société peut lui offrir de bon, sa vie se résume au train d'enfer qu'il conduit vers un seul endroit, son propre terminus. La manière dont Renoir filme d'ailleurs son suicide est remarquable car sans les fards d'une multitude de plans. Lantier a sauté en marche, avec allure. Et déjà il faut dégager la voie pour que tout continue.

Documents : L'assassin a peur la nuit (1942)

Publié en 1946, ce Nouveau Film Complet était consacré entièrement au film L'assassin a peur la nuit (Delannoy, 1942), avec la jolie Louise Carletti en couverture.


Documents : L'homme au chapeau rond (1947)

Comme beaucoup de cinéphiles, légèrement monomaniaques sur les bords, je collectionne tous les documents qui touchent de près ou de loin à ma passion pour le cinéma français (et américain). Ce blog me paraît l'endroit idéal pour continuer à partager avec les internautes, toujours plus nombreux, quelques pièces. J'ouvre donc cette nouvelle rubrique, intitulée simplement Documents, avec un petit magazine publié en 1947, Le Nouveau Film Complet, consacré à L'homme au chapeau rond (Billon, 1946) dernier film de Raimu.


mercredi 27 novembre 2013

Bon anniversaire à ... Clément Michu (1936-...)



Clément Michu, sympathique troisième couteau du cinéma français a prêté son physique de français moyen et ses beaux yeux bleus à une soixantaine de films ou téléfilms. Au cinéma, il fut habitué des nanars tels que Le caïd de Champignol (Bastia, 1965), Le grand bidule (André, 1967) ou Le trouble-fesses (Foulon, 1976). Les cinéphiles connaissent bien son visage grâce à ses diverses apparitions dans les films de Louis de Funès : il est un postier à la Gare de Lyon dans La Grande Vadrouille (Oury, 1966), celui qui confirme à Bourvil que le train vient de partir ; le valet qui annonce "Monsei...sei...c'est la..la,la....la Reine !" dans La folie des grandeurs (Oury, 1971) ou le gendarme septique devant le racisme latent de Victor Pivert dans Les aventures de Rabbi Jacob (Oury, 1973). On l'a revu dernièrement chez Olivier Marchal (MR 73, 2007).

C'est un grand plaisir de souhaiter un très joyeux anniversaire à Clément Michu, 
qui fête aujourd'hui ses 77 ans !


lundi 25 novembre 2013

Bon anniversaire à ... Armand Mestral (1917-2000)



Armand Mestral est un acteur pour lequel j'ai beaucoup d'affection même si, hélas, on ne parle plus beaucoup de lui aujourd'hui. Chanteur à la belle voix grave (il est l'interprète d'une jolie version du Chant du départ), il fut aussi aussi acteur dans une soixantaine de films ou téléfilms, trouvant quelques bons rôles avec Sacha Guitry (Napoléon, 1954), Claude Autant-Lara (Vive Henri IV, vive l'amour, 1960), Jean-Paul Le Chanois (Mandrin, bandit gentilhomme, 1962), Julien Duvivier (Chair de poule, 1963), José Giovanni (Deux hommes dans la ville, 1972) ou Robert Hossein (Les misérables, 1982).

Outre le fait d'avoir été le patron sportif de Bourvil dans Le tracassin ou les plaisirs de la ville (Joffé, 1961), le beau-frère de Jacques Brel dans l'efficace Mon oncle Benjamin (Molinaro, 1969), je considère que son meilleur rôle reste celui de Lantier, l'amant de la Gervaise de René Clément en 1956. Son charisme et son charme sont indéniables et il y a de quoi regretter qu'ils ne furent plus exploités par la suite.

Né le 25 novembre 1917 à Paris, Armand Mestral aurait fêté aujourd'hui ses 96 ans !

dimanche 24 novembre 2013

De nouvelles idées de cadeaux ?

Dans un mois, la plupart d'entre nous aura la chance de découvrir au pied d'un sapin quelques jolis cadeaux de Noël. Hélas, pour ceux qui ne croient plus au Père Noël, le mois précédent est source d'anxiété pour trouver ces fameux présents. L'âge d'or du Cinéma Français se propose de faire le point sur quelques sorties récentes ou à venir, de quoi aider les plus cinéphiles d'entre vous à faire un choix !

Des Blu-ray façon puzzle !


A paraître ou déjà sortis, quelques Blu-ray de classiques du cinéma français : Un singe en hiver (Verneuil, 1962), indémodable depuis plus de cinquante ans et qui cartonne toujours lors de ses passages à la télévision, ressort en Haute Définition agrémenté de bons bonus ; tout comme Le clan des siciliens (Verneuil, 1969), l'excellent Président (Verneuil, 1961) et Mélodie en sous-sol (Verneuil, 1963), avec lequel j'ai plus de mal. Ces ressorties semblent de très bonne qualité aux dires des spécialistes. A noter qu'un coffret Blu-ray avec ces titres existent à la FNAC.

Coïncidence un peu triste bien sûr, les 50 ans de la sortie des Tontons flingueurs (1963) sont marqués par la disparition de leur réalisateur, un des derniers tontons de l'équipe (restent Venantino Venantini que l'on a vu dévasté de chagrin, Claude Rich ...).Gaumont, qui ne perd pas le Nord, offre aux spectateurs les plus monomaniaques un superbe coffret collector (édition limitée à 5000 exemplaires) regroupant le Blu-ray, le DVD, des montagnes de bonus, un livre sur Michel Audiard, la bande originale de Michel Magne et le scénario original du film ... pour la petite somme de 120€. Un intérêt assez limité, il faut bien le reconnaître, mais qui plaira forcément à quelques inconditionnels ... les Années Laser parlent d'édition définitive et lui octroient un 10/10. De quoi attendre avec impatience les surprises de l'édition du centième anniversaire ! Gageons que Les barbouzes (Lautner, 1964) connaîtront peut-être le même sort l'année prochaine. Soyons fous, puisque c'est bientôt Noël, à quand ce type de coffret pour Quelques messieurs trop tranquilles (1972) ?


Yves Robert reste, lui aussi, un indémodable ... sur quelques titres. Un éléphant ça trompe énormément (1976) et Nous irons tous au paradis (1977) ressortent en Blu-ray, toujours dans l'excellente collection restaurée de Gaumont et rejoignent le génial Alexandre le bienheureux (1967) sorti en avril dernier. De même, signalons le cadeau de Noël indispensable, le Blu-ray de l'Assassin habite au 21 (Clouzot, 1942), un des très grands films de Henri-Georges Clouzot avec Pierre Fresnay et ... notre chère Suzy Delair, qui m'a confirmé n'avoir pas été appelée pour le documentaire en bonus. Rageant ! Évoquons aussi les sorties en HD du très agréable Mon oncle Benjamin (Molinaro, 1969) avec un Jacques Brel en grande forme et de très bon seconds rôles ; des Risques du métier (Cayatte, 1967) avec Brel et Emmanuelle Riva ; de la Folie des grandeurs (Oury, 1971) qui ne fait jamais de mal à personne !

Des classiques et des raretés en DVD


Commençons pour une fois par René Chateau, qui ne se modernise pas beaucoup mais qui a l'avantage de rester fidèle à une certaine tradition. En sortie récente, Retour à l'aube (Decoin, 1938) avec la belle Danièle Darrieux, Les mains sales (Rivers, 1951) avec Pierre Brasseur et Daniel Gélin, Le bal des pompiers (Berthomieu, 1949) avec Paulette Dubost, Claude Dauphin et Henri Crémieux, Le portrait de son père (Berthomieu, 1954) avec Jean Richard et Brigitte Bardot ou Quartier latin (Colombier, 1939) avec Blanchette Brunoy et Yves Deniaud.


Dans la collection rouge de chez Gaumont, en sorties non restaurées, signalons Les lions sont lâchés (Verneuil, 1961) avec Claudia Cardinale et Michèle Morgan et Vive Henri IV, vive l'amour (1961) où Claude Autant-Lara réunissait un impressionnant casting pour un film d'époque. Déjà en rayons depuis quelques jours, l'excellent Miroir à deux faces (Cayatte, 1958) réunissant Michèle Morgan, Gérard Oury et Bourvil. Depuis le 13 novembre sont également disponibles Avec le sourire (Tourneur, 1936) avec Maurice Chevalier et Il suffit d'une fois (Felix, 1946) avec Edwige Feuillère et Fernand Gravey. Pour Noël, Gaumont propose quelques coffrets de films rares (3 DVD) pour 20€ généralement : au menu des coffrets Fernandel, Julien Duvivier, Suzy Delair, Claude Autant-Lara, Caroline Chérie, Yves Robert etc. C'est encore assez rare pour être signalé !

Chez LCJ Éditions, moins connu mais diablement efficace, la collection Les films du collectionneur s'enrichie de quelques titres supplémentaires, tels Le bateau à soupe (Gleize, 1947) avec Charles Vanel et Alfred Adam, Le baron fantôme (Poligny, 1943) ou Le vieux fusil (Enrico, 1975) - disponible également en Blu-ray depuis septembre dernier, et qui a rencontré un beau succès à la vente ! LCJ propose également plusieurs coffrets typiquement recherchés à Noël, avec à chaque fois trois DVD ; sont à l'honneur Jean Marais, Jean-Louis Trintignant, Michel Serrault, Romy Schneider, Jean Cocteau et Lino Ventura. L'intérêt de ces coffrets un poil chers est d'offrir des films un peu moins connus tels Le saint prend l'affût (Christian-Jaque, 1966), Le maître nageur (Trintignant, 1978) ou Le bateau d'Emile (La Patellière, 1962). Toujours disponibles : Le chant de l'exilé (Hugon, 1943) pour les inconditionnels de Tino Rossi.

Et allez, puisque les cinéphiles ne sont pas bornés, un mot pour signaler la ressortie en Blu-ray prestige d'un chef d'oeuvre du cinéma américain, La porte du Paradis (Cimino, 1980) avec la jolie Isabelle Huppert, et d'un chef d'oeuvre suédois, Le septième sceau (Bergman, 1957).

Un peu de littérature cinéphile ?

Noël n'est pas forcément la bonne période pour trouver de bons livres sur le cinéma puisque l'occasion est trop belle pour certains éditeurs de sortir quelques vieux torchons réchauffés par des journalistes. Mais cherchons quand même quelques perles, avec un peu d'espoir.


Des mémoires ou livres de souvenirs d'abord - même s'ils sont parfois opportunistes, il y a toujours quelques bonnes choses à sauver dans la vie des artistes qu'on aime ! Jean Rochefort publie Ce genre de choses (Stock) dont je n'ai lu que des bribes, sympathiques ; Mireille Darc publie Une femme libre (Flammarion), sorte de journal de bord si j'ai bien tout compris mais dont j'ignore à peu près tout. Le titre a de quoi rebuter mais il faudra se faire un avis. On reparle aussi de Michel Serrault intime, par sa fille, ce qui peut rassurer un peu. Là encore, je n'ai même pas encore feuilleté le livre mais il tombe à pic pour que Laurent Delahousse consacre un nouveau Un jour, un destin au comédien ... opportunisme, quand tu nous tiens.

Plus intéressant, José-Alain Fralon consacre une biographie à Maurice Ronet, excellent acteur instinctif, au regard et au jeu puissants, mort très jeune d'un cancer et dont la discrétion n'a pas aidé à la postérité. Pour 19€ il sera désormais possible de se faire une idée sur la vie de celui qui fut, entre autres, le rival à l'écran de Alain Delon dans Plein Soleil (Clément, 1960). Chez City Editions, à paraître en novembre 2013, une énième biographie sur Jean Marais, Une histoire vraie. Pour fêter le centenaire de sa naissance, c'est sympathique mais l'auteur étant déjà le responsable d'un Louis de Funès intime et d'un Bourvil, une histoire vraie, j'ai la plus grande méfiance. Je préfère encore me rabattre sur La belle et la bête, les coulisses d'un tournage de Dominique Marny. On trouvera aussi facilement des livres sur Michel Audiard (qui aurait cru qu'un dialoguiste, fut-il de grand talent, serait à ce point sollicité par les éditeurs ?), tout autant que sur Audrey Hepburn ou Marilyn, à croire qu'il faut avoir écrit sur elles pour vendre.

A paraître, un livre de Victor Lanoux (2 heures à tuer au bord de la piscine). J'adore cet excellent comédien mais il y a peu de chances que j'achète cet ouvrage. A vous de me dire si c'est une erreur. Plus intriguant (encore que ...), Raimu mon grand-père, l'occasion de se rappeler au bon souvenir de cet acteur fabuleux.

Enfin, et c'est un grand plaisir de pouvoir l'évoquer, la sortie chez Christian Navarro éditeur des mémoires de Yves Vincent, sympathique comédien populaire né en 1921 et manifestement toujours en forme, que tout le monde connaît grâce à ses incursions dans les films de Louis de Funès. Voulez vous en sourire avec moi ? est disponible sur le site de l'éditeur pour 24€.

"LADY PANAME" (de Henri Jeanson, 1950)



En quelques mots : Caprice est une jeune et jolie chanteuse de cabaret mais sans emploi. Par miracle, elle trouve un remplacement à faire à l'Olympia et un tour de chant, où se trouve une chanson prétendument maudite ... qui va lui porter chance. Aidée par une amie et par un vieux photographe anarchiste, Caprice devient bientôt une star sous le nom de Lady Paname.

Lady Paname est l'unique film réalisé par le scénariste et dialoguiste Henri Jeanson et Gaumont nous permet depuis quelques temps déjà de le redécouvrir en DVD dans la fameuse collection rouge. Sans être tout à fait original, brillant ou carrément mauvais, il a l'intérêt d'exister et d'offrir au spectateur un beau divertissement servi par les artistes qu'on aime : Suzy Delair, Louis Jouvet, Raymond Souplex, Henri Crémieux, Jane Marken ... A titre de comparaison, ce film m'a fait penser au plus récent Faubourg 36 (Barratier, 2008) dans son évocation nostalgique mais inoffensive de l'entre-deux-guerres. On retrouve dans l'oeuvre de Jeanson des morceaux musicaux très agréables - dont Moi j'ai du t'ça, interprété par Suzy Delair, jolie résonance à son Tralala de 1947 - et des personnages convenus : la jolie chanteuse qui est vite repérée accompagnée de sa fidèle amie dénuée de tout talent, le beau parolier qui fait chavirer les cœurs, le vieux chanteur sur le déclin, la mère possessive et le marginal protecteur (excellent Louis Jouvet, comme toujours un rien cabotin).


Le scénario est convenu et manque curieusement de répliques cinglantes, propres à son auteur. Jeanson s'accorde toutefois quelques jolies séquences de cinéma, telle la démonstration de Louis Jouvet que l'amour n'atteint pas aux frontières du temps ou la longue séquence musicale de la première à l'Olympia, pimentée par les tenues très légères de Suzy Delair et les délires sur la vertu d'un illuminé. Lady Paname reste un film propre à faire sourire les inconditionnels de toute cette bande d'excellents acteurs ; les autres n'y verront qu'un moindre intérêt.

samedi 23 novembre 2013

"LE SEPTIÈME JURÉ" (de Georges Lautner, 1962)



En quelques mots : Un dimanche où tous les notables de Pontarlier se retrouvent au bord d'un lac, le paisible pharmacien Grégoire Duval, pris d'une pulsion, assassine une jeune fille qui prenait un bain de soleil. Son amant, que tout accuse, est aussitôt soupçonné de meurtre et jugé. Monsieur Duval se retrouve le 7ème juré du procès du jeune homme et doit décider de la peine à lui infliger.

Pour saluer à nouveau la mémoire de Georges Lautner, j'ai découvert hier soir, après l'annonce de son décès, ce film qui m'intriguait depuis longtemps. Sixième long métrage du réalisateur, et un de ses favoris, Le 7ème juré est une terrifiante plongée au cœur de la petite bourgeoisie citadine de province ; par l'intermédiaire et la voix-off de Grégoire Duval/Bernard Blier, nous sommes associés au conformisme des bonnes apparences, à l'injustice des petits cercles. Un pharmacien assassin que personne ne peut soupçonner, même quand il fait tout pour - même quand il se dénonce ! - face à un jeune homme que tout accuse. Et ce brave notable qui devient, ironie du sort, juré du procès dont il est responsable. Tout est tragique dans cette histoire, admirablement filmée par Georges Lautner et dialoguée par Pierre Laroche. Rarement Bernard Blier n'a été aussi profond qu'en bon père de famille, marié à une jolie femme - sublime Danièle Delorme - portant sur lui le poids de la bonne société, d'un vieux chagrin d'amour gâché par la lâcheté et d'un meurtre.

Réalisé au début des années 1960, Le 7ème juré a toutes les apparences d'un film de la Nouvelle Vague : un jeune metteur en scène filmant frontalement les méandres de la bonne bourgeoisie, l'utilisation de la voix off, un rapport à la ville comme personnage à part entière et un héros en passe de devenir un marginal de sa petite société. Tout le talent du dialogue, et de la mise en scène, est d'inscrire cette base cinématographique récente dans une continuité plus classique, notamment par sa sévère dramaturgie et l'utilisation de seconds-rôles comme premiers (formidables Albert Rémy, Robert Dalban, Henri Crémieux, Yves Barsacq, Jacques Monod, Maurice Biraud). A l'image de certains films de Raymond Bernard ou Julien Duvivier, les stars du films (Blanche, Delorme, Blier) sont parfois éclipsées.



Les films sur la petite bourgeoisie de province ont souvent donné de grandes œuvres de cinéma ; filmer leur opportunisme, leur conscience de classe ou leur volonté hors du commun à sauver les apparences brosse en creux les difficultés d'une société sclérosée où tout le monde pense vivre dans le meilleur des mondes. Bernard Blier, prisonnier de son cadre de vie, trouve peut-être dans l'assassinat un moyen de fuir. Hélas, la très belle fin du film lui prouve que c'est perdu d'avance. Condamné à une folie de bon aloi qui arrange tout le monde, Grégoire Duval, honnête pharmacien respecté de tous, pense payer les frais de sa lâcheté d'autrefois envers une femme qu'il aimait. Le 7ème juré est un film lié à son époque historique - l'éclatement progressif d'une société traditionnelle, qui pourtant existe toujours différemment aujourd'hui - et cinématographique, où la vieille aristocratie paye le prix de ce qui fait tout le miel des jeunes loups du cinéma, la jeunesse aventureuse, insouciante, éprise de liberté.

Décès de Georges Lautner (1926-2013)

Il y a des jours cruels pour le cinéma français et le titre de cette rubrique - série noire - n'a jamais aussi bien porté son nom, puisqu'il s'agit du troisième article que je consacre en forme d'hommage à un artiste décédé en deux jours. J'apprends donc à l'instant la disparition d'un artisan incontournable à la production cinématographique française, Georges Lautner. Et je dois avouer que c'est encore un peu de ma jeunesse qui s'en va avec ce réalisateur fécond, dont les classiques s'accumulent.



Fils de l'excellente actrice Renée Saint-Cyr, qu'il contribua à sortir de sa difficile période d'après-guerre, Georges Lautner débuta sa carrière avec des films que l'on peut aujourd'hui découvrir en DVD, La môme aux boutons (1958), Marche ou crève (1959) ou Arrêtez les tambours (1960). Dès lors, tous ses films sont presque susceptibles d'êtres revus, à commencer par la série d'espionnage mettant en scène Paul Meurisse en espion flegmatique, le Monocle noir (1961), L’œil du monocle (1962) ou Le monocle rit jaune (1964). Le septième juré (1961), au sujet très fort, avec Bernard Blier, était un de ses films préférés. Quelques films moins notables, tels que Les pissenlits par la racine (1963) ou Les bons vivants (1965), nous permettent quand même de revoir Louis de Funès, Andréa Parisy, Dany Saval ou Mireille Darc dans leur jeunesse. La vie dissolue de Gérard Floque (1986) est un témoignage de la fin d'une époque.


 Je ne sais plus par où j'ai découvert Georges Lautner, mais quand je pense à lui, c'est immédiatement les films de Jean-Paul Belmondo qui me viennent à l'esprit, curieusement. La musique de Flic ou voyou (1979) m'obsède depuis quelques minutes ; depuis que j'ai appris le décès de Lautner. Pourtant, si le film se regarde encore avec délice grâce aux dialogues de Michel Audiard et à la présence charismatique de Belmondo, la mise en scène est passée. Un des traits caractéristiques de Georges Lautner, réalisateur, est à mon sens sa capacité d'adaptation à son époque, avec plus ou moins de bonheur. Un académisme de bon ton mêlé à la mode du moment : ainsi des ralentis ou des trois vues différentes d'un même plan de Flic ou voyou, terriblement datés - ou des gros plans du Professionnel (1981), toujours efficaces trente ans plus tard. Je ne me lasse pas de revoir Le Guignolo (1980) malgré les évidentes lacunes du film, tout comme Joyeuses Pâques (1984), adaptation rythmée de la pièce de Jean Poiret. Je n'ai toujours pas vu L'inconnu dans la maison (1992), son dernier film, terrible échec en son temps.

Georges Lautner était aussi l'un des metteurs en images les plus proches de Michel Audiard et c'est sans doute avec une bonne intention que les médias, en hommage, nous repasserons en boucle la scène de la cuisine des Les tontons flingueurs (1963), probablement son film le plus célèbre, à juste titre un chef d'oeuvre de la comédie française, presque tout autant que Les barbouzes (1964). Ne nous fâchons pas (1966), La grande sauterelle (1967) et Laisse aller c'est une valse (1970) complètent cette période bénie, qui s'achève avec l'arrivée des grandes stars, à l'américaine. Alain Delon d'abord, avec ses exigences absurdes (Georges Lautner se souvient d'avoir été obligé de démonter un travelling complexe pour que le chauffeur de Delon puisse garer la voiture de la star) ; Belmondo ensuite. En passant par Gabin (Le pacha, 1968), Pierre Richard (On aura tout vu, 1976), Michel Serrault (La cage aux folles 3, 1985) et même Robert Mitchum (Présumé dangereux, 1989), on pourrait dire que Georges Lautner doit sa carrière aux noms du haut de l'affiche. Cela serait, à mon sens, un peu rapide et j'aurais tendance à penser comme beaucoup que le réalisateur peut faire les vedettes tout aussi bien que l'inverse.

Georges Lautner fut un grand artisan du cinéma français - en témoignent des scènes légendaires des Tontons flingueurs, des Barbouzes, des Belmondo, des Delon et des autres ... un de mes films favoris n'est-il pas Quelques messieurs trop tranquilles (1972) ? Celui qui fut l'un des réalisateurs les plus prolifiques et les plus rentables du cinéma français avait laissé un livre de mémoires, sous forme d'abécédaire (On aura tout vu, Flammarion) dont j'avais déjà parlé sur ce blog. Avec lui s'éteignent quelques fragments de notre jeunesse, quelques souvenirs cinéphiles et beaucoup de plaisirs en forme d'éclats de rires. De là à citer les Tontons, il n'y aurait qu'une facilité ... mais si juste pour résumer cet hommage. Toute une époque ...


Georges Lautner et Mireille Darc (bonus du DVD des Barbouzes)

vendredi 22 novembre 2013

Bon anniversaire à ... Piéral (1923-2003)



"La nature m'a joué un mauvais tour, je n'ai pas fini de lui rendre !" déclarait, non sans ironie, le terrifiant alchimiste du Capitan (Hunebelle, 1960), incarné par Pierre Aleyrangues dit Piéral. Cet acteur de petite taille, d'abord artiste de cirque et de music-hall, débuta au cinéma avec Marcel Carné dans Les visiteurs du soir en 1942 et enchaîna une vingtaine de rôles chez Delannoy (L'éternel retour, 1942 ; Notre Dame de Paris, 1956), Prévert (Voyage surprise, 1947), Ophüls (Lola Montès, 1955), Autant-Lara (Vive Henri IV, vive l'amour, 1961) ou Bunuel (Cet obscur objet du désir, 1977), avec une prédisposition pour les films historiques. Il publia ses mémoires, Vu d'en bas, et trouva la mort, comme beaucoup de seconds rôles de sa génération, dans l'anonymat d'un hôpital parisien.

Né le 22 novembre 1923 à Levallois-Perret, Piéral aurait fêté aujourd'hui ses 90 ans !

Décès de Erik Colin (1947-2013)



Décidément, les jours du doublage français sont bien mornes. Après Maurice Sarfati, je viens d'apprendre le décès du comédien Erik Colin, survenu il y a quelques jours déjà, sans la moindre effusion médiatique. Or, si sa carrière cinématographique est plutôt restreinte - une poignée de films - il est entré dans la légende de la comédie à la française grâce à son rôle de Lieutenant Duvauchelle dans Mais où donc passée la 7ème compagnie (Lamoureux, 1973) et dans la suite, où il est fait prisonnier, On a retrouvé la 7ème compagnie (Lamoureux, 1975). Il est également au casting de deux films de Patrick Schulmann, Et la tendresse ? Bordel ! (1979) et Rendez moi ma peau (1980).

A la télévision, il trouva quelques rôles dans les années 1970 et 1980 et prêta sa voix à de nombreux films et téléfilms : il fut notamment la voix française de Michael Douglas dans A la poursuite du diamant vert (Zemeckis, 1984) ou de l'étoile de mer dans Bob l'éponge.

Décès de Maurice Sarfati (1931-2013)



Nous apprenons aujourd'hui la mort à 82 ans du comédien Maurice Sarfati, sympathique figure que l'on retrouve en troisième couteau dans les années 1950 et 1960, notamment dans L'air de Paris (Carné, 1954), OSS 117 n'est pas mort (Sacha, 1956), Notre Dame de Paris (Delannoy, 1956) ou dans Maigret tend un piège (Delannoy, 1958) face à Jean Gabin. Sa carrière à la télévision fut plus prolifique, à l'instar de son rôle face à Jean Gaven dans Maurin des Maures dans les années 1970. Maurice Sarfati était également connu pour sa voix et ses talents en doublage : il fut notamment la voix française de Tony Danza, Robert de Niro ou Dustin Hoffman.

"UNE JOURNÉE BIEN REMPLIE" (de Jean-Louis Trintignant, 1973)

En quelques mots : Un boulanger, accompagné par sa vieille mère, décide de tuer les neuf jurés qui ont condamné son fils à la peine capitale. A moto et en une seule journée, il exécute les neufs individus de neuf manières différentes. La police fait vite le lien entre les disparus et se lance à la poursuite du tueur.

Sous-titré Neuf meurtres insolites dans une même journée par un seul homme dont ce n'est pas le métier, cet étrange objet cinématographique, qui plus est signé par le sérieux Jean-Louis Trintignant, a de quoi surprendre. L'intrigue originale, l'affiche, la bande annonce laissent entrevoir un récit délirant pour un film mystère. Le visionnage terminé, difficile même de se prononcer. Le réalisateur s'offre visiblement une récréation en filmant l'odyssée macabre de ce paisible boulanger, désireux de venger la mort - qu'il doit juger injuste - de son fils d'une vingtaine d'années. Avec toujours le même rituel : une exécution réfléchie (étranglement médical, fleurs mortelles, explosions chocolatées, revolver aquatique ou tir au pigeon) suivie d'un face à face funeste avec la photo du défunt adolescent. On sent dans cette Journée bien remplie une complète liberté artistique qui permet à Jean-Louis Trintignant de naviguer avec plus ou moins de bonheur entre la farce et le drame. Le début du film est quasi muet et chorégraphié comme dans un Chaplin ; les personnages semblent sortir d'un (mauvais) rêve.

Avec ce décalage, on suit l'aventure rocambolesque de ce boulanger vengeur pendant une longue heure - jusqu'à un meurtre qui s'éternise. Mais par enchantement, le rythme change et Trintignant se permet des folies narratives dans la dernière demi-heure : une voix off d'un technicien qui rate une prise ; un personnage caricatural qui s'adresse directement au spectateur ; une scène cartoonesque avec des CRS ; une radio qui annonce "Vous venez d'entendre le thème du film Une journée bien remplie, c'était le thème du chasseur. A suivre le thème de la mort du chasseur". Le film n'en sort pas meilleur mais se classe, de fait, à part - si ce n'est quelques plans (ralentis ou arrêts sur images) qui rappellent péniblement les années 1970. Jacques Dufilho, que j'adore absolument, ne prononce que quelques phrases, à l'image des autres acteurs, Vittorio Caprioli en tête et Jean-Louis Trintignant dans une petite apparition de dos. A voir pour la curiosité cinéphile.

A noter la très belle, et omniprésente, musique de Bruno Nicolai, qui accompagne à merveille ce film souvent muet. Peut-être suis-je le seul aussi à m'être fait la réflexion qu'un des thèmes ressemble étrangement à celui de Papy fait de la résistance (Poiré, 1983) ?
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