vendredi 22 novembre 2013

"UNE JOURNÉE BIEN REMPLIE" (de Jean-Louis Trintignant, 1973)

En quelques mots : Un boulanger, accompagné par sa vieille mère, décide de tuer les neuf jurés qui ont condamné son fils à la peine capitale. A moto et en une seule journée, il exécute les neufs individus de neuf manières différentes. La police fait vite le lien entre les disparus et se lance à la poursuite du tueur.

Sous-titré Neuf meurtres insolites dans une même journée par un seul homme dont ce n'est pas le métier, cet étrange objet cinématographique, qui plus est signé par le sérieux Jean-Louis Trintignant, a de quoi surprendre. L'intrigue originale, l'affiche, la bande annonce laissent entrevoir un récit délirant pour un film mystère. Le visionnage terminé, difficile même de se prononcer. Le réalisateur s'offre visiblement une récréation en filmant l'odyssée macabre de ce paisible boulanger, désireux de venger la mort - qu'il doit juger injuste - de son fils d'une vingtaine d'années. Avec toujours le même rituel : une exécution réfléchie (étranglement médical, fleurs mortelles, explosions chocolatées, revolver aquatique ou tir au pigeon) suivie d'un face à face funeste avec la photo du défunt adolescent. On sent dans cette Journée bien remplie une complète liberté artistique qui permet à Jean-Louis Trintignant de naviguer avec plus ou moins de bonheur entre la farce et le drame. Le début du film est quasi muet et chorégraphié comme dans un Chaplin ; les personnages semblent sortir d'un (mauvais) rêve.

Avec ce décalage, on suit l'aventure rocambolesque de ce boulanger vengeur pendant une longue heure - jusqu'à un meurtre qui s'éternise. Mais par enchantement, le rythme change et Trintignant se permet des folies narratives dans la dernière demi-heure : une voix off d'un technicien qui rate une prise ; un personnage caricatural qui s'adresse directement au spectateur ; une scène cartoonesque avec des CRS ; une radio qui annonce "Vous venez d'entendre le thème du film Une journée bien remplie, c'était le thème du chasseur. A suivre le thème de la mort du chasseur". Le film n'en sort pas meilleur mais se classe, de fait, à part - si ce n'est quelques plans (ralentis ou arrêts sur images) qui rappellent péniblement les années 1970. Jacques Dufilho, que j'adore absolument, ne prononce que quelques phrases, à l'image des autres acteurs, Vittorio Caprioli en tête et Jean-Louis Trintignant dans une petite apparition de dos. A voir pour la curiosité cinéphile.

A noter la très belle, et omniprésente, musique de Bruno Nicolai, qui accompagne à merveille ce film souvent muet. Peut-être suis-je le seul aussi à m'être fait la réflexion qu'un des thèmes ressemble étrangement à celui de Papy fait de la résistance (Poiré, 1983) ?

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